Peut-on guérir de l’eczéma ?
Démangeaisons, peau sèche, plaques rouges, vésicules… Quand l’eczéma nous touche, ou touche nos enfants et rend la vie compliquée, le premier réflexe est de chercher comment s’en débarrasser définitivement ! Et très souvent l’entourage est source de conseils et de remèdes miraculeux qui donnent l’espoir d’une guérison rapide… Marjolaine Hering, Dr en pharmacie, nous apporte son éclairage.
Mais peut-on vraiment guérir de l’eczéma ?
L’eczéma, ou dermatite atopique, touche près de 20% des jeunes enfants, mais chez la plupart d’entre eux il disparaît avant l’âge adulte. Alors dans ce cas, s’agit-il de guérison ?
En fait il s’agit d’une rémission des crises, qui peut être définitive ou non. L’eczéma est, comme le diabète par exemple, une maladie chronique. Elle évolue par crises inflammatoires et est causée par une réponse immunitaire inadaptée et une barrière cutanée défectueuse : la peau est poreuse donc elle est sèche et laisse pénétrer un plus grand nombre d’allergènes qu’une peau normale. Puis le système immunitaire réagit de façon inappropriée et la crise se déclenche.
Actuellement il n’existe pas de traitement pour réparer définitivement cette barrière cutanée. Il existe par contre des traitements locaux ou par voie générale pour réguler la réponse immunitaire et lutter contre l’inflammation, et donc pour calmer et limiter les crises.
Mais si on ne peut pas à proprement parler guérir de l’eczéma, on peut espacer les crises, diminuer leur intensité et leur durée, voire les faire disparaître.
La première mesure indispensable pour cela est l’application d’un produit émollient sur tout le corps tous les jours entre les crises (pendant les crises, l’application de dermo-corticoïdes ou autre traitement local sur les plaques est conseillée), et ce tout au long de la vie. Ces crèmes ou baumes émollients vont pallier les manquements de la barrière cutanée : ils hydratent et nourrissent la peau, l’assouplissent (et donc la rendent moins fragile) et forment un film protecteur sur la peau. Ils évitent ainsi que des allergènes pénètrent dans la peau et déclenchent une nouvelle crise. Ils sont donc à adopter définitivement dans sa routine quotidienne ou dans celle de son enfant dès la première crise !
Ensuite, il faut essayer d‘identifier les facteurs déclenchant les crises et les éviter au mieux : allergènes (poils d’animaux, acariens, pollens, certains aliments…), produits irritants (laine, lessives, produits ménagers ou produits cosmétiques), pollution, stress… C’est une des grandes difficultés quand on a de l’eczéma car ces facteurs peuvent être nombreux et peuvent varier au cours de la vie. Il faut donc s’armer de patience et de persévérance. Tenir un journal de bord pour noter la survenue des crises et les circonstances de leur déclenchement (lieu, climat, environnement, état psychique (stress, fatigue ?)) peut être d’une grande aide pour identifier les facteurs déclencheurs.
Enfin, le traitement approprié des crises est très important car un des facteurs déclencheurs principaux de l’eczéma est l’eczéma lui-même : si la peau est constamment lésée, elle laisse pénétrer encore plus d’allergènes, et un cercle vicieux s’enclenche. Le traitement classique des crises est l’application de dermocorticoïdes (le corps), mais d’autres traitements existent, comme les immunosuppresseurs locaux (visage) ou par voie générale. Et depuis quelques mois, des traitements de biothérapie peuvent être proposés aux adultes souffrant d’eczéma modéré à sévère non soulagé de façon acceptable par les traitements classiques.
Ainsi, s’il n’est pas possible de guérir totalement de l’eczéma, on peut tout à fait limiter le nombre et la sévérité des crises. Pour cela il est indispensable d’être suivi par un dermatologue sensibilisé à l’eczéma et à l’écoute. Et il peut être aussi très utile de s’informer et de se former soi-même, à travers les Écoles de l’Atopie par exemple (ateliers d’éducation thérapeutique proposés par certains CHU), ou en rejoignant l’Association Française de l’Eczéma !